« Nourrir sainement, durablement, procurer du plaisir en mangeant et faire en sorte que ce soit compatible avec un développement juste… c’est ce qu’il y a de plus gratifiant. »
– Zoltan Kahn, agriculteur bio et Directeur Général de Terres du Pays d’Othe
Dans cet article, découvrez Terres du Pays d’Othe, nouveau partenaire de nona. Née d’une association d’agriculteurs bio installés sur les aires de captage des Eaux de Paris, cette entreprise réinvente la filière alimentaire sur son territoire pour proposer une alimentation plus saine, locale et accessible, le tout en préservant la ressource en eau. A travers une démarche coopérative et un modèle intégré de production et de transformation, ils reprennent la main sur leur production et dessinent un nouvel avenir possible pour l’agriculture.
Sommaire
Terres du Pays d’Othe : une agriculture bio d’intérêt général
Une filière complète et intégrée, de la graine à l’assiette
De l’initiative régionale au changement systémique
Un engagement personnel moteur
Notre approche partenariale
La prochaine étape est économique
Conclusion ? il faut passer à l’acte !
Terres du Pays d’Othe : une agriculture bio d’intérêt général
A l’origine de Terres du Pays d’Othe, une rencontre entre besoins agricoles concrets et politiques publiques sur un territoire particulier. Entre Bourgogne et Champagne, les terres agricoles du Pays d’Othe se situent sur les aires de captage d’eaux de la ville de Paris. Ce territoire stratégique a fait converger les intérêts des producteurs bio, en quête de débouchés stables, et ceux de la ville de Paris, qui cherchait à préserver la ressource en eau tout en soutenant le développement de systèmes alimentaires durables. De ces différents besoins est né, en 2018, un projet entrepreneurial et collectif inédit.
Aujourd’hui entreprise de l’économie sociale et solidaire, Terres du Pays d’Othe poursuit trois missions principales et essentielles :
- Valoriser l’agriculture bio, générer des revenus pour les agriculteurs et la rendre accessible au plus grand nombre
- Protéger la ressource en eau et préserver sa qualité en cultivant de manière responsable sur des zones stratégiques
- Fournir une alimentation saine, locale et durable, en priorité à la restauration collective mais pas uniquement
Du lien clé entre qualité de l’alimentation et qualité de l’eau potable, l’initiative d’abord privée a permis de lier différentes dynamiques de transition et de faire de sa démarche un projet d’intérêt général. Aujourd’hui, les agriculteurs membres de Terres du Pays d’Othe produisent, transforment, distribuent, militent et s’imposent progressivement dans un écosystème complexe et parfois hostile au changement.
Une filière complète et intégrée, de la graine à l’assiette
Terres du Pays d'Othe est unique par sa capacité à maîtriser l’ensemble de la chaîne alimentaire. Concrètement, de la production des matières premières à l’expédition des produits finis, l’entreprise fait tout : ”On a un site unique avec plein d'ateliers. On reçoit les graines et on transforme tout sur place. Et donc c’est ce qui nous rend forts parce que tout est intégré. On n'a pas de rupture de charge [logistique], donc pas de coûts de transport ni de coûts de transaction inutiles.” Et les bénéfices de cette organisation sont nombreux. Autonome, l’entreprise réduit ses coûts et propose des produits finis sains, traçables, à faible empreinte carbone et qui permettent une juste rémunération des producteurs.
Terres du Pays d'Othe produit et commercialise ainsi une large gamme de produits - légumes secs, farines, pâtes, huiles, rôtis végétaux, jus - à partir d’ingrédients de qualité pour les collectivités, les professionnels, la distribution, les particuliers et en volumes conséquents. “On fait du circuit-court mais à des débouchés nationaux. Notre but est de développer l’agriculture biologique sur le territoire, de valoriser les produits qui en sont issus ainsi que leurs producteurs”.
Aujourd’hui, les produits qui conservent les caractéristiques particulières de leur terroir et cette logique de circuit-court ont fait leur preuve et continuent d’évoluer. Deux projets d’extension de l’activité sont prévus dans l’année - un projet de conserverie et un projet de gamme décortiquée - et plusieurs partenariats sont également en cours de négociation. “La zone des aires de captage c’est 25000 hectares donc on a une capacité aujourd’hui à augmenter notre production sur le territoire et à la valoriser davantage. Mais l’objectif n’est pas de devenir grossiste. Nous sommes transformateurs, et notre modèle est un modèle de développement de la consommation d’aliments bio qui proviennent de notre région et un modèle de valorisation. Et pour avoir un maximum d’impact aussi bien sur les consommateurs que sur les producteurs, il faut faire un maximum de volume tout en restant fidèle à notre production artisanale”.
A la croisée des transitions agro-écologique, alimentaire et économique, l’engagement et l’utilité du projet sont reconnus. D’abord Lauréat des investissements d’avenir à France 2030 et Lauréat du Fond Avenir Bio, Terres du Pays d’Othe est maintenant en cours de certification Max Havelaar, label qui lui permettra de garantir sa démarche de commerce équitable.
Terres du Pays d’Othe recrée du lien entre les acteurs du territoire et propose un modèle plus juste et solidaire. Tout le monde y est gagnant. “C’est extraordinaire de retrouver le lien entre mon champ et la bouche qui va consommer le produit ! Avec Terres du Pays d’Othe, on recrée du lien entre la terre et le mangeur, et je pense que c’est extrêmement sain, c’est très important pour les agriculteurs.”
De l’initiative régionale au changement systémique
Un engagement personnel moteur
Aux commandes du projet, Zoltan Kahn - agriculteur engagé, directeur d’une entreprise de consulting et Directeur Général de Terres du Pays d’Othe - ne compte pas ses heures. Pour lui, les motivations sont nombreuses. Passionné d’agriculture depuis l’enfance, il a à cœur de respecter l’environnement et son écosystème. A ces convictions écologiques s’ajoutent le plaisir de bien manger et l’envie de rendre une alimentation saine et de qualité accessible au plus grand nombre.
Un homme, trois casquettes mais surtout un constat : faire évoluer les pratiques nécessite beaucoup de temps, d’engagement et n’est pas toujours rentable. Il faut savoir bien s’entourer et garder le cap ! “Nourrir sainement, durablement, procurer du plaisir en mangeant et faire en sorte que ce soit compatible avec un développement économique, environnemental et social juste, c’est… De tous mes métiers, c’est ce qu’il y a de plus gratifiant. Ce n’est pas du tout celui qui rapporte le plus mais à part peut-être l’éducation ou la culture, je ne vois pas de mission qui fasse plus de sens”.
A présent, tout l’enjeu est de continuer à faire vivre cet engagement en diffusant plus largement le message et en soutenant le développement de ce modèle sur d’autres territoires. “Dans le modèle de Terres du Pays d'Othe est compris sa réplication. C'est-à-dire le fait que l'on soit capable d'accompagner soit d’autres territoires, soit d'autres agriculteurs pour faire la même chose. Ce qui est important c’est qu’on est une initiative privée mais qui en réalité travaille sur l’intérêt général. Donc nous, notre espoir et notre volonté c’est de développer d’autres “Terres de…” sur le même modèle”.
Une approche partenariale commune
C’est dans cette logique de coopération et de développement du projet que s’inscrit le partenariat avec nona. Comme nona, ce fournisseur engagé redonne du sens à nos assiettes, notamment en restauration collective.
Dans la démarche de transition vers une alimentation durable, le travail de produit brut et le fait-maison sont indispensables. Or, et c’est une problématique également identifiée par Terres du Pays d’Othe, tout le monde n’a pas nécessairement l’appétence et les compétences pour le faire. “La resto co, comme le secteur agricole, a besoin de sortir de ses vieux réflexes, c’est exactement pareil. Et pour ça elle a besoin de compétences, d’outils qui lui donnent des idées, qui l’aident à la fois à concevoir et planifier sa production, qui lui facilitent la vie tout simplement. Parce qu’on a demandé à la restauration collective de modifier ses pratiques d’achat et ses façons de faire mais on n’a pas amélioré ses dotations en moyens. Donc tout ce qui peut les aider et les accompagner c’est fondamental pour nous.”
C’est donc en travaillant ensemble que l’on peut valoriser et soutenir des filières plus exigeantes et montrer que la transition de nos modèles agricoles et alimentaires est possible.
La prochaine étape est économique
Pourquoi ce modèle n’est-il pas plus répandu? Qu’est-ce qui freine le passage à un mode de production qui fait sens et crée du lien sur le territoire? Sur ces questions, Zoltan Kahn n’hésite pas une seconde : “Le principal frein c’est le revenu. [...] Le problème aujourd’hui, en France, c’est qu’on a monté tout un système de filière longue et qu'on n’apporte pas aux agriculteurs une sécurité économique quand on les embarque dans la transition agroécologique et alimentaire”. Cela est d’autant plus problématique que la part des distributeurs est trop élevée, bien plus que dans d’autres pays. Dans ce système, deux victimes : le producteur et le consommateur, éloignés par une chaîne d’intermédiaires et leurs profits : “On a choisi de donner beaucoup d'argent à l'Etat et beaucoup d'argent aux gros opérateurs entre le producteur et le consommateur. C'est un choix politique dont on n'arrive pas à sortir et qui ne peut pas marcher durablement”
Face à cette situation, il est catégorique, la clé du changement est économique et le soutien politique indispensable. Il estime que l'agriculture doit davantage être pensée comme un levier systémique mais qu’une réelle stabilité économique doit être créée pour pérenniser les modèles agricoles durables. “Un agriculteur c'est un entrepreneur qui compte et il ne refusera jamais de mettre du sens s'il peut nourrir sa famille. Si on crée un système rémunérateur et qui en plus fait sens, on embarquera tout le monde! Encore faut-il le faire”.
Un mot pour conclure?
Il est temps de passer à l’acte ! “On a mis de l'argent sur l'animation, sur les PAT, sur la gouvernance, tout ça on l’a fait. Mais ces gens-là, ça fait 25 fois qu’ils se voient et maintenant on n’apprend plus rien. Maintenant, le problème c'est le système économique. [...] On a su le faire pour la transition énergétique et l’achat de voitures électriques. Maintenant il faut faire de la bonification sur EGalim ou du chèque alimentaire pour faire en sorte d’orienter les choix alimentaires des foyers, mais quand va-t-on le faire? Une fois qu’on a compris les enjeux, qu’on a sensibilisé les acteurs et créé des valeurs communes, il faut passer à l’acte ! et pour passer à l’acte, à un moment donné, comme dans toute transition, il n’y a pas d’autre solution que de mettre de l’argent sur la table. On est dans un monde payant, voilà tout.”